Bleecker Street

Il y a des nuits qui me manquent. C’étaient des nuits où j’avais du temps, où il était toujours assez tôt. Où je laissais les mots s’assembler sous me doigts, comme ça, où j’avais baissé ma garde. C’étaient des nuits où j’avais laissé le monde s’endormir autour de moi, en rentrant tard après une balade nocturne à pieds dans la ville. Où je ne prenais pas garde de ne pas me perdre, pour un temps. C’étaient ces moments magiques où j’avais laissé le stress aller coller des insomnies à d’autres, où mes musiques me prenaient et me déposaient là où elles le voulaient bien, c’étaient des nuits dont le calme me portait pour travailler sur des photos par plaisir. Où je me laissais vagabonder en pensées et puis les mots s’assemblaient sous mes doigts, comme ça. C’étaient des nuits où je n’étais pas plus heureuse que maintenant. Maintenant, la nuit je dors, je ne regrette rien. Je fais mille et un trucs bien plus passionnants toute la journée, et maintenant mes musiques se ressemblent, je les connais, elles me rassurent. Je ne me perds plus à pas d’heure dans les rues presque désertes et quand je vagabonde, c’est bien plus loin. Et les mots ne s’assemblent plus, comme ça, sous mes doigts, ils ne suivent plus les mêmes méandres, ils ne tourbillonnent pas, ils ne m’entrechoquent plus. Et il n’est plus trop tôt ou trop tard pour ce que je veux. Et je ne changerais pas ces nuits d’avant contre mes journées de maintenant. Maintenant, la nuit je dors et je ne regrette rien.
Mais certaines nuits, il est des nuits qui me manquent.


Simon & Garfunkel – Bleecker Street



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