Route de Comè – 10.01.2009
je vais finir mon dixième film scanné et déjà , je m’ennuie, je ne sais pas bien comment je vais arriver à finir les 26 autres. ni à démêler ce qui vaut vraiment le coup ou pas. bien sûr, là je fais déjà une présélection, mais je ne fais que distinguer les évidences de mes ratés. les quelques incontestables réussites, que je ne juge pas toujours sur leur qualité intrinsèque mais sur le souvenir que j’en avais. mais je ne me souvenais très précisément que de cinq ou six. pour le reste, ce sont des entre-deux, des éventuellement, des pourquoi pas, des c’est pas mal ça, des je l’aime bien mais est-ce que ça suffit ? ou des on verra bien… et je me demande quelle place elles auront dans une histoire qui ne serait pas la mienne.
je guette des détails, des imperfections qui ne me choqueraient absolument pas si ce n’était pas mes photos, les cadrages un peu trop centrés, les instants un tout petit peu mal choisis, les expositions vacillantes, tous ces moments où j’avais le regard happé par tellement de trucs que je ne voyais plus grand chose, tous ces moments où je n’ai pas su choisir exactement, tous ces moments où j’ai oublié de prendre le temps. ce n’est pas si grave, c’est juste qu’à force de tout vouloir on n’a rien de complet. d’un côté, le numérique, les photos d’agence, l’immédiateté, chaque photo est une info, ne pas avoir à se soucier du manque de film, faire beaucoup plus d’images et répondre à une esthétique très particulière. de l’autre côté, du film noir et blanc, construire des histoires lentement, essayer de poser ou d’imposer sa patte et sa subjectivité. et puis même en noir et blanc je ne sais pas choisir, j’aime le flou, le contraste, le grain et les cadrages bancals, et j’aime aussi la netteté, les millions de nuances de gris, la perfection… alors je n’ai pas choisi, je ne sais pas et ne veux pas choisir mais face à un même événement, il faudrait bien, comment raconter une histoire de A à Z sinon sans tout mélanger ? je n’ai pas encore trouvé, j’ai tout mélangé. je suis ni d’un côté ni de l’autre, jamais contente.
pourtant quand je regarde tout ça, quand je vois la vie qui se diffuse, qui déborde de mes planches-contact, quand je revois ces regards qui ont transpercé mes objectifs, quand je songe à toutes les distances que j’ai dû traverser pour coller à mon sujet au 35 mm, mes distances surtout, j’ai bon espoir. je ne sais pas si j’ai fait un saut en avant, un pas sur une marche, un tressaillement de côté, un bond sur un tout autre chemin, je ne sais pas bien, tout ce reportage, c’est peut-être juste mon petit cap de bonne espérance à moi.
j’ai presque fini le onzième film. ça me dit pas comment je vais faire pour scanner les 25 restants. p’tet bien en continuant à raconter des conneries considérations hautement intéressantes ici.
et en écoutant du Schubert, histoire d’avoir l’impression de repartir d’ici, de reprendre la fuite vers un tas de nouveaux ailleurs.
Schubert – Impromptu en Fa mineur