Belgrade – 06-05

ce lundi est bizarre, plein d’attentes au final. on essaie de se rendre au meeting politique de boris tadic, mais il est apparemment repouss? ? mercredi. st?phane et moi passons un bout d’aprem avec sander, un ?tudiant en journalisme n??rlandais, qui cr?che dans notre auberge. Il reste ? Belgrade jusqu’aux elections puis partira pour pristina et mitrovica. on ?change nos contacts sur place, on parle beaucoup de nos plans, de nos envies, de journalisme. on lui raconte le premier meeting de samedi. st?phane et le?la se pr?parent ? partir pour pristina puis prizren.
vers 7 heures, la coll?gue de mon p?re nous rejoint ? l’auberge pour nous rencontrer. si l’expression “le rire est la politesse du desespoir” a ?t? invent?e pour quelqu’un, je me dis que ?a doit ?tre pour elle. on discute pendant un bon moment, elle me frappe par son humour noir. un couple d’instits am?ricains en hongrie nous ?coute d’une oreille pendant qu’on parle de politique internationale ou de nos syst?me ?ducatifs respectifs. elle se marre quand on lui parle de sarko ?videmment, on ?coute attentivement son opinion sur le kosovo et la politique. comme chez beaucoup de belgradois qu’on a rencontr?, le d?sabusement est assum?.
le soir, on squatte la salle commune qu’on transforme un peu malgr? nous en newsroom, avec tous nos ordis, calepins ouverts et t?l?phones un peu partout. on ne sort pas finalement, m?me pour une bi?re, sans doute trop fatigu?s…

St?phane et Le?la nous quittent t?t ce matin, c’est sp? de leur dire au-revoir. on va se recroiser ? mitrovica de toute fa?on mais d’ici l?, on aura tous v?cus nos propres aventures. en d?but d’aprem, am?lie et moi filons rencontrer un activiste gay, on discute pendant deux bonnes heures dans une petite chambre d’appartement. toutes nos rencontres sont passionnantes, j’ai du mal et pas le temps de l’?crire bien, de rendre justice ? tout ?a, ? tout ces trucs qu’on partage tout d’un coup avec tous ces gens, mais je me sens incroyablement bien au milieu de tout ?a, tout est naturel et sans chichis. et extraordinairement interessant, bien s?r.

on se perd un peu en allant acheter nos billets de bus pour Pristina, mais en chemin, on voit remonter des petites rues, des grappes de militants du parti nationaliste de nikolic se rendant ? son meeting. aucun bien s?r ne nous dit parler anglais, mais ils jouent tous le jeu quand je les prends en photo.
le meeting commence sous la pluie, on se r?fugie dans un grand caf? avec vue plongeante sur la foule et tous les drapeaux. on y croise une jeune journaliste fran?aise mais sa condescendance nous d?becte. puis on redescend faire interviews et photos. pour une fois, depuis le d?but de ce trip, je crois que je suis vraiment contente de ce que je fais, je ne suis pas s?re que l’atmosph?re pesante limite ?touffante s’y pr?te cela dit, c’est ?trange quelque part. la foule se disperse tr?s vite et un quart d’heure apr?s la fin du meeting, l’ambiance est redevenue normale. on ?change tous nos impressions. Sander et moi pr?tendons ?tre australiens pour nos photos de militants un peu flippants. les autres n’ont aucun mal ? interviewer en anglais ou fran?ais plein de sympathisants.
on finit par partir pour notre derni?re soir?e presque tous ensemble, directions les berges de la Sava et les p?niches-bars. on gal?re pour trouver la bonne station de bus, puis pour trouver la voie sur berge, entre seringues et p?cheurs. tout est ferm? : apparemment, les belgradois ne sortent qu’? partir du jeudi, par contre, ?a doit ?tre super chouette en ?t? ou pendant le week-end. la soir?e se transforme en fiasco jusqu’? ce qu’on finisse par d?nicher un des plus vieux restos de Belgrade dans une batisse au coeur du centre-ville. cadre vieillot et cossu, il parait que ce resto a accueilli toute l’?lite politique, intellectuelle et m?me dissidente des ann?es Tito. on reste l? un bon moment ? refaire le monde, avec bi?re et cabernet serbe, et comme partout ailleurs, plats excellents et compl?tement abordables.

je passe sur plein de trucs, nos blagues pourries, nos surnoms, notre fatigue, les trucs qu’on voit partout, nos “hey, t’as vu ?a ?”, nos reflexions sur belgrade qui nous plait ? tous ?norm?ment, notre enthousiasme m?l? d’une pointe d’appr?hension quant ? la suite du trip. c’est quand on commence ? peine ? se familiariser avec la ville qu’on doit la quitter, ? regret, m?me si on y repassera bri?vement avant de revenir ? Paris. on s’est dit plein de fois en d?connant qu’on ne voulait plus rentrer, je ne crois pas qu’on d?connait tant que ?a. je n’ai pas le temps de me poser ou d’?tre vraiment seule et quand je le suis, je suis juste trop crev?e pour mettre tout ?a un peu en ordre. on est d?j? le 7, plus que 10 jours. j’ai tellement pas h?te de rentrer…

Belgrade 05-05

mon dimanche matin bouff? par une grasse mat’, je me mets au boulot pour trier mes premi?res photos, num?roter mes films. le temps est moche donc on bosse studieusement ? nos d?rushages respectifs. en fin d’aprem, on bouge enfin avec st?phane, am?lie et ariane pour prendre l’air au Kalemegdan, un grand parc au nord de la ville. on se prend une jolie sauc?e mais la lumi?re et le vieux fort sont beaux. et je me rends compte que ces cr?tins chez Mx2 m’ont livr? des 24 poses au lieu des 36 command?s. il va falloir que je trouve une boutique photo ici avant de quitter Belgrade, juste au cas o?…
dans le trolleybus, on fait connaissance avec une ?tudiante qui nous propose de la retrouver le soir m?me pour nous montrer des bars. elle nous rejoint ? l’association des globes-trotters, un bar en sous-sol d’un immeuble du centre, introuvable sans adresse. d?co tr?s intimiste et confortable et prix pour bobos belgradois, on passe quelques heures ? assaillir notre ?tudiante de questions sur tout. elle endure notre feu roulant en rigolant dans un anglais un peu approximatif mais on apprend des tonnes de trucs. quand on lui dit qu’on se pr?pare ? partir au Kosovo, elle nous sort un “why would you want to go there ??!” tr?s surpris, ce qui nous conforte dans l’id?e qu’on risque de gal?rer. enfin au moins une partie d’entre nous.

on rentre apr?s ?a un peu apr?s minuit, grosse journ?e aujourd’hui et r?u qui commence avec le premier caf? : meetings politiques, rendez-vous et questions ? nos contacts, d’autres r?dactions ? joindre…. le temps est toujours couvert, ? une semaine des ?lections, finies les vadrouilles touristiques, le vrai travail et la vraie course commencent aujourd’hui.

Belgrade – 04-05

lying in my small bed, trying to reflect on what we learned today, what we saw, what we were told, where we are and what we’ll do… i’m not sure yet what to think, i guess it’s all going too fast right now, and i can’t find any time. there will be a ton of plans to make tomorrow and maybe i’ll find a moment on my own to think and write more.
still, know that the quite hidden ‘globe-trotters association’ is a great place…

Belgrade – 03-05

24 h de bus, mais d?j? ? la gare eurolines, on aurait eu besoin d’un fixeur pour comprendre les chauffeurs qui ne parlent que serbe, comme la majorit? des voyageurs. 24h du bus ? essayer de pioncer et se r?veiller ? temps parfois au milieu de la nuit en allemagne, ou pour apercevoir au loin les montagnes autrichiennes, le lever de soleil pr?s de la fronti?re, la campagne et les petits villages hongrois, l’attente ? la fronti?re serbe. ma voisine me traduit au fur et ? mesure les commentaires des chauffeurs qui se r?sument bien souvent ? “on va faire 10 minutes de pause l?”, ? un arr?t on parle un peu avec une voyageuse qui revient des fian?ailles de sa fille ? Paris. “oui l’eau est potable partout” nous dit-elle alors qu’on remplit nos bouteilles ? une pompe au milieu de la cambrousse serbe “y’a pas d’industries polluantes ici, d’ailleurs, y’a pas d’industrie ici”, elle se marre, redevient ? moiti? s?rieuse “mais ?a va changer, enfin j’esp?re ! si vous parlez aux gens, vous verrez, ils sont nostalgiques de la yougoslavie…”
on apprend deux trois mots de serbes, da, ne, hvala… je retrouve mes vieux r?flexes de 5 ann?es de russe pour lire le cyrillique, puis arriv?e sur Belgrade, en contrebas, des bidonvilles des roms sous le pont de l’autoroute ? l’entr?e de la ville.
on marchande un peu pour le transport en taxi, histoire de pas payer de surcharge bagages, on prend le num?ro de notre chauffeur qui comprend un peu le fran?ais, juste au cas o?. notre auberge est dans un vieil immeuble mais l’int?rieur est confortable, wifi, caf? turc ? volont?, terrasse dont on profite aussit?t pour les derniers rayons de soleil.

premier jour, premi?re r?u boulot ? 10h du mat’ et missions de la journ?e, trouver des cartes de t?l?phone, relancer nos contacts, trouver les horaires de bus pour le kosovo et plein d’autres trucs. premi?res vadrouilles et premi?res images avec notre cadreur. de part et d’autre d’une grande avenue, deux batiments portent encore les traces des bombardements, des plaies b?antes de fer tordu et pierres calcin?es et sur les vieux b?timents ? c?t?, des ?clats plus clairs dans la pierre grise. dans la rue, personne n’y pr?te plus attention. on continue, vieux trams rouge et jaunes, trolleybus cahotants, yugos et coccinelles au milieu de toute la modernit? d’une capitale, ?normes b?timents sovi?tiques des ann?es 50 et ?glises orthodoxes un peu partout.
on tombe par hasard sur un meeting politique sur une grande place. drapeaux europ?ens, drapeaux au couleurs du parti, gosse au premier rang qui agite une banderole en carton, militants qui me demandent de les prendre en photo ou qui agitent leurs drapeaux encore plus quand je les vise.
premiers rep?rages, on prend d?j? nos marques, on joue ? se perdre et ? d?chiffrer les noms des rues souvent absents et toujours en cyrillique. la bi?re se sert toujours en pinte, les clopes co?tent 1,5 euros, et ?a y est, on se rend compte qu’on a presque du mal ? fumer au restaurant.
premi?res impressions d’une ville qui s?duit ?norm?ment… mais mes lentilles collent, ?a doit ?tre l’heure d’aller m’?crouler sous la couette ou quelque chose comme ?a.

je te raconte pas le bordel, des c?bles qui sortent de chaque prises de mon placard ? balais pour recharger tr?s exactement huit batteries diverses et vari?es. je sais pas si quelqu’un a invent? le concept du “voyager l?ger”, genre prendre le strict minimum, trois t-shirts, un slip et une brosse ? dents, mais si ?a a ?t? invent?, m’est avis que ?a l’a ?t? par quelqu’un qui voyageait au 18e si?cle. sans t?l?phones portables. sans appareils photos. sans ordi portable. sans cam?ra. sans truc type archos pour d?charger ses cartes m?moires. quelque part, m?me si j’appr?cie tout ce luxe technologique, je r?ve de partir sans fil ? la patte.
je te passe le chat qui s’?clate dans les c?bles. ou dans mon duvet qui a?re. ou qui me regarde d’un air un peu inquiet genre “non mais demain c’est f?ri?, qu’est-ce que tu t’excites, ?a va pas ou quoi ?”
je te raconte pas le bordel, les sacs qui d?bordent de matos, de films que je dois trier, de choix ? faire ? l’avance et pas savoir s’il vaut mieux trop que pas assez.
je t’?pargne le d?ner aval? sur le pouce et les dix mille trucs en t?te ? pas oublier et les vingt mille trucs ? finir et puis le stress qui se l?ve au fur et ? mesure que j’?cluse tout. ces trucs urgents qui se sont empil?s ? tous les trucs urgents que je fais depuis deux semaines.
je te raconte pas le bordel, le passeport dans un coin et une enveloppe et tous les papiers ? imprimer demain.
je te dis pas en d?tail les deux derniers bouclages de tr?s tard du soir avant de partir et les yeux qui collent des larmes de fatigue ? force de courir partout depuis deux semaines et de pas bien dormir la nuit ou en tout cas vraiment pas longtemps.
je vais pas te prendre la t?te avec mes histoires de photos rat?es parce que c’?tait un jour sans, je vais juste dire que nique le vent quoi. et que je suis pas la seule ? le penser et que des fois, ben ?a fait du bien d’entendre “pis on s’en fout”. m?me si on s’en fout pas pour de vrai de vrai. on peut toujours faire comme si.
je te raconte rien ou si peu du bordel que c’est ce truc. les checklists. les mails sans arr?t. les coups de fil.
je te dis pas l’envie et la pression mais surtout l’envie que j’ai. les putains d’envies m?me. les trucs que je vois pas bien encore mais que je sens bien l?.
je te dis pas comme je suis comme une dingue de partir mais bon, ?a tu t’en doutes, au moins un peu.