Pour finir le mois de mai en beauté, et avant de revenir très bientôt par ici plus souvent pour de nouvelles aventures bien chouettes, World Sound #10 vient de sortir, avec dedans — mâtin quel journal ! — un portfolio de 8 pages sur le vaudou au Bénin. Et puis aussi du reportage en laïve de Joburg, Soweto et Langa. Et plein de chouettes articles.

World Sound 10

C’est la classe, c’est über-bath et si vous l’achetez pas, je vous parle plus.
Oui, farpaitement.

Comme une boule d’angoisse au creux de l’estomac, à force de tourner en rond, ça se noue en tourbillons là-dedans. Trop de compromis pour pas beaucoup de résultats et un vieux sentiment de gâchis. Je rigolais en disant que j’avais quasi pas fait de noir et blanc en Afrique du Sud ou au Kosovo récemment, mais je rigolais jaune. Le fait est que j’ai pas voulu choisir alors j’ai mal choisi et ça me bouffe. Mais reste le doute que même si j’avais dégainé mon leica plus souvent, j’aurais sans doute pas fait mieux, même en faisant différent. Quoique. J’aurais quand même voulu faire différent. ça et avoir du temps au lieu de partir dans tous les sens parce que merde, faut rentabiliser et que j’ai pas les moyens de faire autrement. Pas fait assez, pas fait assez bien. Ni fait ni à faire quoi. Je suis arrivée là où je suis, pas très loin quoi, en regardant les photos dans des bouquins ou des magazines et tout le reste c’est du feeling, deux temps trois mouvements vu qu’il n’y a jamais le temps, pas de pause, pas de poses non plus, et hop. J’ai jamais contacté ou rencontré les photographes qui me font baver, j’ai pas refait de formation par manque de moyens, j’ai surnagé dans mon coin en lisant du Depardon. L’écriture d’un reportage, le regard, l’identité, les images que j’ai dans la tête, tout ça j’essaie d’apprendre sur le tas, en faisant comme je peux sans arriver à inventer. Mais c’est tellement loin d’être assez.
Alors je bute sur mes limites et pour la première fois depuis 10 ans, je me dis merde, et si c’était vraiment mes limites ? Pas genre un palier à franchir, pas d’excuses à la con de manque de temps ou de manque d’argent, pas de fausses raisons de cible, pas de tergiversations style j’ai pas su choisir mais la prochaine fois je saurais, non, boum, la limite, le mur quoi. Et l’angoisse face à la hauteur, au manque de prises et d’entraînement. Oh je pourrais rester de ce côté, c’est pas trop difficile, plutôt tranquille même à défaut de me faire bander. Sauf que c’est la grimpette qui me fait tripper et moi, je suis pas assez.

Un jour, ma mère m’a écrit ça :
“If parents do the right thing, they have to teach you that a dream has to be more than a dream, it has to be about getting up in the morning and staying late, accepting that you’re not good at the beginning but that you’ll get better, and giving yourself the right to get better.”
C’était il y 10 ans.

benin atogo vaudou
Une vodounsi d’Atogo – 01.09

Bon allez, celle-là je l’aime bien même si elle est pas… ahem… faudrait que j’apprenne à avoir le cuir plus dur quand je me fait bouler des rédactions ou je vais me bouffer tout cru et j’aurais plus qu’à changer de métier et je serais bien attrapée.

La nuit est tombée tout d’un coup, en trois ou quatre photos, un peu comme une enclume silencieuse qui ferait juste un petit poc. Il faisait jour et puis une photo plus tard, l’autofocus patinait et j’étais ? 1.4. Encore deux photos et quand j’ai relevé le nez de mon viseur, il faisait nuit noire. C’était ma première soirée béninoise et j’avais déjà les yeux plein de cette terre ocre-orangée et du contraste avec le vert des bananeraies et des manguiers. En moins de vingt-quatre heures, je m’étais déjà emmêlée les pinceaux dans le protocole en étant présentée à deux rois, j’avais déjà assisté à un rituel vaudou auquel je ne comprenais rien et censé donner force et vigueur, dans une case minuscule où? une prêtresse m’avait fait boire une eau étrange et j’étais déjà un peu impressionnée par le masque géant du Zangbeto du village de Doutou.
C’était le premier jour et j’ai surtout noté que la nuit tombait trop vite, un peu comme une enclume silencieuse qui ferait un petit poc.

bénin adepte zangbeto doutou
Un adepte du Zangbeto – Doutou, 09.01.2009

Le deuxième jour reste comme celui où Simone est tombée en rade après environ 72521 photos en 4 ans et m’a laissée en plan avec une fête vaudoue à peine entamée sur les bras à couvrir au 35 ou 40mm, ce qui est un peu court. Cela étant, Simone a eu le bon goût de rendre l’âme après le sacrifice rituel d’une vierge (ahem, une chèvre vierge) mais avant le défilé des communautés d’adeptes. Passée la rage qui a su retenir les larmes de dépit, en sueur et couverte de poussière, il a fallu accepter le noir et blanc dans des conditions qui hurlaient à la couleur, aux rouges violents, aux violets éclatants, aux verts tranchants, dans une mer orange.
Le deuxième jour, Simone m’a lâchée et j’ai eu chaud et j’ai eu le tournis, j’ai eu mal au ventre et envie de pleurer au beau milieu de gens qui dansaient et chantaient dans une orgie de soleil et de couleurs, comme quoi, on peut pas tout contrôler.

bénin fête du vaudou 2009 com?
Danses vaudoues – F?te des cultes Vaudous à Comè, 10.01.2009

Enfin bref, tout ça pour dire que je commence enfin à mettre des photos de vaudou sur mon site, par là, que c’est du noir et blanc par choix drastique et que la sélection fut draconienne selon des critères évidemment pas forcément objectifs mais qui se tiennent au moins un petit peu.


Hrsta – Une infinité de trous en formes d’hommes

b?nin

Voilà, ça y est. C’est fini. Tout fini. A part deux-trois photos subsidiaires, mais sinon tout le reste de mes photos du Bénin sont FINIES ! Hop, boum, finito, done, OVER. J’ai bien cru que j’en arriverais jamais à bout, voire qu’elles viendraient à bout de moi. Des fois, je regardais mes scans, pis je regardais photoshop dans l’autre écran, et je me disais bon, elle va sauter dedans cette photo-là et elle va se bosser toute seule. Manque de pot, ça a jamais marché, va comprendre.
Tout ça pour dire qu’en plus, luxe, gloire et volupté, j’en ai mis une cinquantaine sur mon site. Pour l’instant, c’est que de la photo de voyage un peu en vrac, sans intérêt majeur, pas de la grande photo quoi, mais comme d’hab des trucs j’ai aimé faire. Pour l’aspect vaudou, rois, sacrifices et tout, on verra plus tard.
Non mais je vois bien que vous vous dite “oh allez, elle se moque, elle se gausse de nous”. Mais pas du tout, y’en a vraiment plein. De la couleur qui tabasse, du noir & blanc luxueux de snob, pour de vrai de vrai. Donc bon, si ça vous intéresse de savoir ce qu’est le kpayo, un zem, la pendjari ou une tata somba, ou trouver comment joindre la Clinique La Lumière du Dr Esprit, ben hop. Vous savez ce qu’il vous reste à faire.

évidemment, en bossant tout ça, j’arrêtais pas de me demander si j’avais assez tiré partie de ce trip et ce qu’aurait fait un autre photographe, et si j’avais pas tout foiré. Faudrait que je trouve le moyen de me foutre la paix, je me fatigue.
Enfin, les scanner, les bosser, tout ça, ?a m’a fait me rendre compte à quel point la portra 400NC est le meilleur film du monde. Et le 50 1.4 est mon objo préféré. Enfin, avec le summicron 35.
Pis je voudrais bien un 5D, style tidsuite. Tsé, même pas un MkII qui fait vidéo et passe l’aspi et change la litière du chat, non, un 5D tout bête (quoique, réflexion faite, si ça change vraiment la litière et rabat le couvercle des toilettes, on peut p’tet négocier et trouver un terrain d’entente). Ah, et avec un 16-35 aussi, merci bien. Et un mamyia 7 aussi pour pas être chien. Voilà voilà.


The Dandy Warhols – Love Song

bénin

Atogo – 15.01.2009

(bientôt, j’en mettrais un tas sur mon site, mais bon, je sais pas si ça sera avant mon départ ou après mon retour)