Bon, c’est indéniable, l’avantage avec la cessation de paiement et redressement judiciaire d’Eyedea Presse (dont Gamma), c’est qu’on parle un peu de photojournalisme et même pas pendant Visa pour l’Image. évidemment, c’est aussi un bon prétexte pour être nostalgique, sortez flonflons zet mouchoirs et allons-y pour ENCORE une rétrospective ou des articles où on va ENCORE parler des mêmes photos célèbres, archi-revues, des mêmes photographes qui ont fait l’histoire ou je sais pas quoi. Alors que je sais pas si vous avez remarqué, mais les photographes salariés de Gamma qui se retrouvent à moitié sur le carreau, on connait pas beaucoup leurs noms. Ils disent juste “14 photographes salariés”. hop voilà , emballez c’est pesé. Oh le Figaro a bien fait un mini diaporama de 5 photos “gracieusement” offertes par le photographe. Ben voyons. ça a p’tet pas dû lui suffir que Gamma fonde les plombs, y’en a qui sont maso quand même.
Enfin…
Peut-être que ça veut juste dire qu’il est grand temps de tuer le père. Parce que par exemple, aux états-unis, ils ont Mediastorm, ils ont le NY Times qui investit dans du contenu original. En Angleterre, ils ont Demotix qui essaie un truc avec une philosophie intéressante. Ils essaient des trucs quoi.
Nous là on a quoi ? Le fig qui se fait offrir des photos et une éééénième expo Cartier-Bresson. Je rigole pas. C’est au Musée d’Art Moderne en ce moment à Paris. On dirait qu’en France on n’est bon qu’à se regarder le nombril avec nos bôôôs photographes qui “sont rentrés dans l’histoire”, voire carrément à se palucher devant Cartier-Bresson, alors que, comme d’hab, la presse paie que dalle pour produire des bons reportages. Mais arrêtez de nous saouler avec HCB quoi ! On sait, c’est “l’oeil du siècle” (sic), on sait qu’on est tous borgnes, mais merde à la fin.
Je vais faire une confidence lèse-majesté, j’ai jamais aimé HCB et ses photos. ça m’a jamais touché. peut-être parce qu’il visait un genre de perfection, ô mythe de “l’instant décisif” et que ça m’a toujours paru froid, un peu clinique. Et puis le mythe du grantomme, révéré, adulé, ça me gave. C’est chiant. Moi je préfère un Depardon, qui met ses tripes sur la table. Qui fait des bouquins style Errance, qui avoue ses failles et qui avance avec. Je préfère le photojournalisme actuel, largement. Qui raconte juste des histoires et ne prend pas les lecteurs de haut.
Alors quand on en aura fini avec les rétrospectives à la con du best of des meilleures photos d’HCB qui n’ont été exposées que 591 fois et publiées 39574 fois, on pourra p’tet avancer !
Oh j’exagère un chouille, après tout, on a bien l’oeil Public ou Tendance Floue pour relever un peu tout ça. N’empêche. L’hypocrisie de la presse finit par faire mal. Comme à Visa pour l’Image où tout le monde s’extasie dans la presse sur le bien beau photojournalisme actuel (très bien, je suis pour) alors que le reste de l’année, on envoie les journalistes qui ont du talent et de bonnes idées, non pas sur le terrain les réaliser, mais en gros, se faire foutre. Et on les paie au lance-pierre aussi, tant qu’à faire. Faudrait pas qu’ils puissent vivre de leurs photos, comme par exemple, ooooh incroyable, dans les années 70 dont tout le monde est tellement nostalgique.
Et le PDG d’Eyedea d’en rajouter une couche dans Lib? “On a tué le photojournalisme français en obligeant les agences à salarier les pigistes” Faudra demander au fantôme de Françoise Demulder ce qu’elle en pense, elle qui est morte d’un cancer dans la misère parce que son agence lui avait jamais fourni de couverture sociale. On peut bien s’extasier sur le fait qu’elle ait été la première femme à avoir un WorldPress, ça doit lui faire une drôle de belle jambe là où elle est. Donc en gros, s’ils avaient été bien précaires comme les petits copains, c’est sûr que ça aurait été vachement mieux.
Pas sûr que le photojournalisme s’en serait mieux porté hein, mais après tout, qui s’en soucie encore vraiment ?
Allez, achevons le père et allons-y, on a juste notre futur à inventer.